Hommes, femmes… Fonctionnons nous de la même façon ?

 


Hommes, femmes

Fonctionnons nous de la même façon ?


Quels rôles vont jouer l’éducation et le regard de la société ?

Quelle est la part de l’héritage moral dans nos comportements ? 

Enfin, nos différences sont-elles source d’incompréhension ?

                             

                            Laurent Certain, sexothérapeute   

                               https://g.page/r/CbuLxpMP1KFZEBM/review



Voilà un sujet sensible. Propre à créer bien des polémiques et bien des conflits !

Mais finalement, ces réactions « épidermiques » ne seraient-elles pas à l’origine même de notre incapacité à communiquer ? à reconnaître nos travers respectifs ???




Une situation parfaitement identifiée et largement exploitée dans l’imagerie populaire


Il suffit pour le constater, de regarder les humoristes.

Les artistes de stand-up, hommes comme femmes, font de ces différences et de cette incompréhension, leur principal fonds de commerce !

Les femmes brocardent les hommes, les hommes égratignent les femmes et heureusement, on réussit également à se moquer de soi même.

On finit par rire de notre incompréhension réciproque, de nos travers respectifs et ça, c’est plutôt positif.

Pourquoi rit-on d’ailleurs ? Simplement parce que dans ce domaine, le particulier rejoint souvent l’universel. Le sketch qui se joue devant nous, nous l’avons déjà vécu ! Nous retrouvons nos colères, nos agacements mais aussi le ridicule de nos propres comportements.

C’est là tout le talent de l’humoriste : réussir à nous faire rire avec ce qui hier, aurait pu nous faire bondir de colère !



Si nous réussissons à rire de nos travers dans un spectacle, pourquoi n’est on pas capable de le faire dans la vie ?


C’est là toute la question...sans doute parce que l’affect, l’amour propre et une évidente mauvaise foi nous en empêche ?

C’est idiot je vous l’accorde. Pour autant, en sommes nous entièrement responsables ?

Ce blocage relève-t-il réellement de l’inné ? Ne serait il pas plutôt du domaine de l’acquis, le résultat néfaste de siècles d’éducation patriarcale et d’habitudes sexistes ? de phénomènes de défense (de part et d’autre) qui, faute d’avoir su rester objectifs et honnêtes, se seraient transformés en affrontement ?



Quen est-il de cet héritage et de ces principes éducatifs et moraux ?


Nous les avons tous plus ou moins en tête.

L’héritage commence avec la place dévolue à chacun.

L’homme des cavernes, l’homme fort, qui estourbit l’auroch à coups de massue pour nourrir la famille Pierrafeu qui l’attend sagement autour du feu ( si tant est que le feu soit déjà découvert…).

L’histoire se poursuit avec le preux chevalier, l’ homme héroïque, qui estourbit à coups de masse d’arme, le gueux qui aurait des vues sur Dame Cunégonde.

Arrivons par de grands raccourcis, à Bernard, l’homme laborieux, qui rentre du bureau, n’estourbit rien du tout mais « gagne l’argent du ménage » et retrouve Nicole qui l’attend en préparant une blanquette de veau.

Je sais, c’est très caricatural mais cela reste représentatif de la place assignée à chacun : un homme « pourvoyeur et protecteur » et une femme «faible et dépendante ».


Faut-il s’étonner que dans un tel système, on n’ ait accordé le droit de vote aux femmes qu’en 1944 ?

Faut-il s’étonner que les femmes n’aient eu le droit de travailler, d’avoir un compte en banque et le droit de remplir un chèque sans l’autorisation de leurs maris, qu’en 1965 ?

1965 !!! même si ça n’est pas hier, ça ne remonte pas non plus aux Mérovingiens !


La sphère de l’amour et de la sexualité n’échappe pas d’avantage à la mainmise de l’homme sur la femme. L’homme a des « besoins », la femme, elle, a des « devoirs » (le fameux devoir conjugal…).

On frémit à la lecture de certains manuels destinés aux jeunes filles et futures « bonnes » épouses, des années 50/60... on nous explique (sans rire et sans frémir) que l’épouse doit accéder aux demandes et désirs (décrétés légitimes) de son mari, quitte à se forcer un peu. On nous dit que le mari travaille dur et qu’il est par conséquent, en droit d’attendre un peu de reconnaissance et d’abnégation !

Ce même mari qui pourrait à l’occasion user, voire abuser de sa secrétaire, sans déclencher un séisme pour autant. « c’est un séducteur » dira-t-on de lui, un homme qui plaît aux femmes. Presque un compliment !

Par contre, que sa femme, fasse la même chose avec le laitier, et là le vocabulaire ne sera plus le même, on passera dans le registre des « traînées » et autres « Marie-couche-toi-là ».

Deux poids, deux mesures. Oui, c’est injuste, c’ est révoltant et il faudrait être aveugle pour ne pas comprendre le combat féministe. Par contre, êtes vous bien certain que les choses aient tellement changées ?

En 2024 les mentalités ont un peu évolué, l’homme qui passe l’aspirateur ne se sent plus forcement dépossédé de sa virilité, pour autant je ne suis pas certain qu’une majorité d’entre eux, n’y voient pas un acte de galanterie, de « grandeur d’âme » dont on devrait leur être reconnaissant ! Mais bon, je me trompe peut-être …



Sexualité. Égalité ? vous avez dit égalité ?


En revanche, sur le chapitre de la sexualité, l’évolution des mentalités prend tout son temps. Ça va lentement, trèèèèèèès lentement !

La théorie de l’égalité hommes/femmes face à la sexualité est admise.Théoriquement.

Théoriquement seulement…

Le diktat a la vie dure. Ce qui nous semble « philosophiquement » normal (l’égalité), nous paraît bizarrement moins évident au regard... de la moralité !

On continue à admettre (voire à glorifier) la libido masculine, à la considérer comme un marqueur de la vitalité, une preuve de charisme viril.

La libido féminine elle, est tue, passée sous silence au nom de la décence. Si elle venait à s’exprimer au grand jour ce ne serait la plupart du temps, que pour être mise à l’index. Marquée du sceau de la débauche.


Vous trouvez que j’exagère ? Je vais vous donner un exemple.

Peut-être êtes vous parents d’adolescents (sexuellement actifs) ? Ou l’avez vous été, ou en avez vous dans vos relations ?

N’avez vous jamais été témoin de ces conversations où les parents du jeune Enzo, se glorifient des conquêtes féminines de leur rejeton ? s’amusent presque du tableau de chasse de leur petit séducteur ? De ces copines qui, d’une semaine à l’autre, ne sont jamais les mêmes ? Je suis persuadé que oui.
Maintenant, avez vous souvent assisté à cette même glorification concernant la jeune Chloé ? la petite Chloé qui chaque semaine, aurait un garçon différent dans son lit ?


Vous voyez bien que rien qu’en lisant cette dernière phrase, il y a quelque chose de gênant, une image qui « pique » un peu les yeux et notre sens moral ! Et pourtant… ici, que ferait Chloé que ne ferait pas Enzo ? Pourquoi les parents de Chloé ne s’en feraient-ils pas une gloire comme ceux d’Enzo ?


Le voila le fameux « deux poids, deux mesures », prosaïquement résumé en

« là ou l’homme est un séducteur, la femme est une s----- ! »


Certains vont peut-être trouver que mes propos sont dénués de nuance, teintés de féminisme primaire et de parti-pris, que je noirci le tableau et que ce n’est pas comme ça qu’on va « ouvrir » le dialogue ?

Peut-être… mais je crois au principe qu’un problème ne peut se régler qu’en identifiant les sources du problème en question. Quitte à les caricaturer quelque peu pour mieux les caractériser !

Je crois aussi que cet héritage, cette position dans laquelle la morale, l’éducation et la religion, ont « installé » l’Homme et la Femme, est grandement responsable de certaines incompréhensions entre eux. Que nos comportement le plus souvent, obéissent à des principes qui ne sont que des postulats, des « évidences creuses » inventées de toutes pièces par ceux qui y trouvaient un intérêt.

« Une femme n’est pas suffisamment responsable (et intelligente) pour avoir un compte en banque ». Voilà ce qu’est un postulat, une allégation sans fondement. Ça le restera jusqu’à ce qu’on vienne m’apporter les preuves indiscutables du contraire !



Où cet héritage « transpire » dans nos comportements


Car oui, il transpire ! qu’on ne se fasse pas d’illusions, même pleinement conscient du problème, de son caractère aberrant, on continue d’y obéir ! J’ai évoqué cette différence de traitement concernant la sexualité et surtout de la perception que nous continuons malgré nous, à en avoir (rappelez vous Chloé…). Il y a beaucoup d’autres comportements qui traduisent cette emprise presque inconsciente :


- Ces femmes qui cherchent dans la relation de couple une présence « rassurante », « protectrice », une « épaule » sur laquelle s’appuyer… une relation qui leur garantirait une « sécurité ». Un homme qui « assure » et « rassure ». Un désir qui arrive en droite ligne des temps les plus reculés ! Madame Pierrafeu, Dame Cunégonde...Un désir qui finit par devenir une attente légitime, presque une exigence. Une situation où la femme, presque inconsciemment, redonne une légitimité à ce principe de soumission/domination.


- Ces hommes qui n’ont de cesse que d’asseoir leur position d’homme de toutes les manières possibles (j’ai de gros bras, une grosse situation, une grosse voiture, une grosse…). Qui exhibent leur virilité avec ostentation pour attirer la femme qui rendra verts de jalousie les autres mâles alentour ! Le « mâle dominant »… une notion qui s’ancre des deux pieds dans l’animalité la plus primaire, non ?


- La galanterie, qui si elle nous semble être la marque des êtres évolués, n’en fait pas moins partie de cet héritage sexiste ! Quoi qu’on en dise, l’homme qui au restaurant lors d’un premier rendez-vous, ne dégaine pas d’un air entendu sa carte bleue, prend un peu le risque de passer pour un mufle ou un pingre. Ici aussi, même si c’est sous couvert de gentillesse, l’homme est bien dans ce désir d’asseoir une supériorité protectrice...


- Ces femmes qui lors de ce même premier rendez-vous, prennent la ferme résolution, quelle que soit leur envie, de ne pas « succomber » le premier soir au risque de passer pour des femmes faciles. Sachant qu’elles finiront par satisfaire ce désir charnel (bien légitime) au deuxième rendez-vous, qu’est ce qui peut bien les pousser à différer ce contact si ce n’est répondre à un code sociétal jugé « moralement correct » pour une femme « honnête » ?


On pourrait s’amuser longtemps à trouver d’autres exemples, ils ne manquent pas…
Mais comme ce serait trop simple, les contre-exemples ne manquent pas non plus, ces situations « changeantes » où, ayant conscience de l’absurdité de ces injonctions, nous décidons d’y contrevenir pour qu’insidieusement elles nous rattrapent ( le lendemain,10 minutes plus tard…) !



Quand et pourquoi naissent les incompréhensions


C’est souvent de ces situations d’indécision (obéir ou désobéir à ces principes ?) que naissent les incompréhensions et les malentendus. Nous nous sentons (hommes comme femmes) tiraillés entre deux sentiments :


- un premier, guidé par l’intellect, par la réflexion et le raisonnement : la conscience de notre égalité et la nécessité d’abandonner les schémas archaïques. La volonté d’évoluer et de s’extirper d’un comportement instinctif.


- un deuxième, commandé justement par notre instinct et un peu aussi par la facilité : l’acceptation de notre « humanitude » et de ces comportements qu’on tient souvent pour hormonaux tant ils sont installés en nous. Ne pas aller contre puisque c’est notre « nature ».


Pas de jugement tranché, ces deux sentiments sont entendables… ça ne poserait d’ailleurs pas vraiment de problème si chacun s’identifiait ouvertement dans l’un ou l’autre de ces fonctionnements. Il suffirait soit de ne fréquenter que ses semblables, soit de composer avec l’autre en toute connaissance de cause. C’est ce que nous faisons dans d’autres domaines comme la politique, la religion et même les habitudes alimentaires…

Mais là encore ce serait trop simple ! Il ne suffit pas de choisir son camp une fois pour toutes, et de se tenir à l’un de ces deux comportements. Non, le plus souvent nous faisons nôtres ces deux propositions. Alternativement qui plus est...et sans aucune logique de chronologie ou de situation !

Je vous laisse imaginer l’incompréhension qui peut naître lorsque chez deux personnes, ces comportements « intellectuels » OU « instinctifs », ne sont pas en phase.






Petit exemple caricatural sous forme d’historiette !


Chloé et Enzo ont aujourd’hui 30 ans, ils vivent ensemble et se définissent comme un couple moderne, intelligent et ouvert au dialogue.

Enzo, gaillard musclé d’1m85, décideur, coach sportif, barbe de trois jours, affiche et assume sa virilité.

Chloé, jeune femme élancée, teint pale, enseignante, féministe modérée à ses heures. Ses fines lunettes rondes ajoutent à son look d’intellectuelle.


Chloé et Enzo discutent. Ils discutent précisément du couple, des comportements masculins et féminins, de la nécessité de ne pas se laisser enfermer dans un cadre établi et sexiste.

Chloé pense que les hommes gagneraient à lâcher du lest, à sortir des clichés virils censés séduire les femmes. Les femmes au contraire, « fondent » devant la sensibilité, dit-elle. Il faut quitter sa carapace, enfin assumer sa part de féminité et ne pas craindre d’en perdre sa virilité pour autant ! Quoi de plus touchant qu’un homme capable de pleurer ?

Enzo il y a cinq minutes encore, se sentait assez loin de cette image. Néanmoins, après réflexion, il admet que Chloé a raison. Son rôle de mâle Alpha ne serait-il pas un peu une posture ? et dans quel but ? se rassurer soi-même ? séduire l’autre ?

Il semblerait finalement que non, ça ne séduise pas vraiment Chloé… du coup, ça ne le rassure pas non plus.

Enzo 2.0 émerge donc, fort de ses nouvelles résolutions. Désormais il assumera sa sensibilité et sa part de féminité, et même , il les revendiquera.
Trois jours ont passé, Chloé vient de revoir « un tramway nommé désir ». Elle doit avouer que Brando, dans son rôle de bad boy, ne la laisse pas indifférente et se surprend même à imaginer ce que pourrait être l’étreinte avec ce parangon de virilité...

Vous aurez compris qu’en ce moment précis, Enzo et sa féminité assumée n’entrent pas vraiment dans l’équation érotique de Chloé. On ne saurait trop lui conseiller de ne pas en faire état pour l’instant !


Nous sommes ainsi faits, hommes comme femmes, nous sommes des êtres complexes, des êtres d’indécision et de paradoxe. Ce qui vaut maintenant n’aura plus cours demain. Ce qui vaut pour l’un ne vaudra pas pour l’autre…

Faut-il s’en défendre ?



Et si c’était justement la solution ?


Faut-il s’en défendre ? Disais-je. Nous savons pertinemment que, quelles que soient notre volonté et nos résolutions, nous sommes dans l’incapacité de garder ce cap sans en dévier, au gré du moment ou des circonstances…

Alors ? Alors la solution ne serait-elle pas de l’accepter ? d’admettre une fois pour toutes que ces paradoxes contribuent à faire de nous des humains et non pas de froides machines ?

Ne serait-il pas autrement profitable et sain, de savoir s’ouvrir, l’un devant l’autre, de nos comportements puérils ? Savoir en rire ensemble, s’en moquer, serait sans doute le plus sûr moyen de désamorcer ces conflits stériles !
Parler, admettre, avouer… c’est souvent dédramatiser une situation qui n’a rien de dramatique. Je le constate lors des consultations de couple : le silence, la dissimulation et le déni, finissent par devenir un miroir déformant de la réalité, une espèce d’ effet loupe. Ce qui n’est pas dit est imaginé, et ce qui est imaginé ne connaît pas les barrières de la réalité. Le gravier devient vite montagne !

C’est toujours un immense plaisir d’aider les gens à dire les choses, à avouer leurs inquiétudes et leurs peurs pour finalement voir leurs visages s’éclairer quand ils découvrent que la montagne n’est qu’un gravier !


N’ayons pas peur de nos incohérences, de nos paradoxes et de nos incompréhensions… prenons le parti d’en rire ensemble en toute complicité plutôt que d’en faire un conflit ! 


 

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