Voyeurisme et exhibitionnisme
Voyeurisme et exhibitionnisme
Laurent Certain
https://g.page/r/CbuLxpMP1KFZEBM/review
« Voir et être vu »
Une consigne vertueuse quand il s'agit de sécurité routière, une perversion quand il s'agit de sexualité !
Intéressons nous d'un peu plus près à ces deux notions, avec objectivité et sans idées préconçues.
Avant toute chose, voyons la définition que donne le dictionnaire pour ces deux mots :
voyeurisme
Pulsion qui consiste à observer l’intimité ou la nudité d’une ou plusieurs personnes et à y éprouver une jouissance, une excitation.
(Par extension) Dans un contexte non sexuel, complaisance à regarder des comportements généralement considérés comme intimes ou secrets.
exhibitionnisme
Pulsion qui consiste à exhiber, en public, les parties intimes de son anatomie (fesses ou parties génitales par exemple).
Il a été arrêté pour exhibitionnisme, il se baladait avec son machin à l’air.
(Par extension) Dans un contexte non sexuel, complaisance à montrer des comportements généralement considérés comme intimes ou secrets.
« Pulsion ». Ce mot semble, d’après le dictionnaire, caractériser ces deux notions en tout premier lieu … la pulsion, qui échappe au conscient, à la maîtrise. Un comportement irrépressible qui peut vite devenir répréhensible !
Répréhensible ? Oui, car voyeurisme et exhibitionnisme sont deux mots qui s'affichent en lettres rouges, comme les mots « perversité » et « illégalité » dans notre grille de lecture de bons citoyens !
Le voyeurisme et l'exhibitionnisme sont ils des crimes ?
Ils peuvent l'être, oui. Ils peuvent être considérés comme tels, dans la mesure où ils concernent des personnes non consentantes ou pire, des enfants.
Exhiber ses parties génitales à la sortie de l’école est un crime.
S'introduire dans le jardin de sa voisine et se coller à la fenêtre de sa douche est un crime.
Le voyeurisme et l'exhibitionnisme ne peuvent s'entendre sans la présence d'un tiers : une personne placée dans le rôle d'acteur pour le voyeurisme et de spectateur pour l'exhibitionnisme. C'est l'essence même de cette pratique. Dans un cas comme dans l'autre, si cette personne n'est pas consentante, il n'y a plus d'acteur et de spectateur mais bel et bien une VICTIME.
Ne minimisons d'ailleurs pas cette victimisation, si le voyeur ou l'exhibitionniste ne tire de cette pratique que de l'excitation sexuelle et ne fait preuve d'aucune violence corporelle envers ses victimes, la violence n'en est pas moins réelle. Réelles aussi sont les séquelles psychologiques dont peuvent hériter ses victimes.
Le voyeurisme et l'exhibitionnisme sont ils des perversions ?
Si l'on s'en tient à la liste des trouble paraphiliques, oui. Le voyeurisme et l'exhibitionnisme se trouvent en bonne place à coté de la pédophilie. Un voisinage qui laisse peu de doute quant au caractère pervers de la chose...
Pour autant, n'existe-t-il pas des versions « admises » de ces habitudes jugées perverses ? Des interprétations « grand public » qui nous exonéreraient de nos penchants coupables ? Des espèces d'alibis en somme...
Que dire de ces émissions de télé-réalité où les réalisateurs nous plongent dans l'intimité d'une bande de jeunes gens (physiquement choisis) enfermés dans une seule maison ? Quand les caméras s’immiscent jusque dans leurs lits ou dans la douche ? Ne sommes nous pas dans l'attente de LA scène ou de LA révélation croustillante ? Que penser d'une autre émission qui, sous couvert de survivalisme, parachute un homme et une femme au milieu de nulle part, et surtout nus comme des vers ? Un slip et une culotte rendraient-ils le challenge moins méritant ?
Ces émissions rencontrent un franc succès et font une formidable audience. Qu'en déduire selon vous ? Serions nous tous des pervers en puissance ? Le voyeurisme ne serait-il pas finalement inscrit naturellement dans notre fonctionnement sexuel ?
Si par hasard, imaginez...
Je voudrais vous faire part ici de discussions que j'ai pu avoir avec des gens en consultation. Le voyeurisme et l'exhibitionnisme (ou tout au moins le fait de voir et d'être vu, d'aimer ça ou d'en avoir peur), sont des préoccupations récurrentes en sexothérapie.
Beaucoup de patients ont cette vision perverse qui leur est servie par la société et la morale.
Une vision qui peut devenir problématique dans la mesure où elle impacte et empêche la sexualité du couple... tout mon travail consiste dans ce cas, à leur faire accepter ces désirs enfouis, à les déculpabiliser de leur « humanitude ».
Dans ce but, j'ai inventé un petit scenario :
Vous êtes en vacance à l'Océan et vous vous baladez sur la plage. Vous marchez longtemps, loin...
Ah oui...j'aime bien !
À force de marcher, vous vous retrouvez sur la plage désertée par les baigneurs, vous êtes seul(e), loin du monde. Tout à coup, au détour d'une dune, derrière les touffes d'oyats, vous apercevez un couple en train de faire l'amour !
…........
Que faites vous ?
Euh... je fais demi tour !
Ce couple ne vous voit pas, vous êtes masqué(e) par la végétation. Il n'y a personne sur la plage. Donc vous faites demi tour ?
Ils ne me voient pas ?
Non. Les baigneurs non plus, ils sont beaucoup trop loin.
Euh... dans ce cas je crois que je regarderais un peu...
Pourquoi ?
Ben... quand même... c'est un peu excitant je trouve, non ?
Voilà. J'ai raconté cette petite histoire à beaucoup, femmes et hommes. De mémoire personne n'a jamais suivi son intention première qui était de faire demi-tour dans l'instant !
Que doit-on en conclure sinon que le plaisir de voir et l'excitation sexuelle qui en découle, sont inscrits en nous ? Que nous sommes capables de succomber à cette « pulsion », de faire fi des convenances et de la moralité si nous nous savons à l'abri de tout regard, donc de tout jugement ?
N'est ce pas d'ailleurs ce que nous permet virtuellement la pornographie ?
Le voyeurisme et l'exhibitionnisme peuvent-ils être un moteur de notre sexualité ?
Je le pense, oui ! La sexualité pour s’épanouir et perdurer, à besoin d'être variée, inventive et protéiforme. Nous avons tout à gagner à cette mise en action de tous nos sens, le toucher, la vue, l'odorat, les mots... La sexualité est un peu comme un bouquet : si l'on mélange les fleurs et les couleurs, il n'en sera que plus chatoyant !
Donc oui, pratiqués dans le cadre du couple, sans plus aucune notion de victime, dans un consentement et un désir mutuels, le voyeurisme et l’exhibitionnisme peuvent devenir de puissant moteurs de notre sexualité ! Il faudra juste réussir à se défaire de cet amalgame avec la perversion criminelle qui en est trop souvent fait.
Voir et être vu. On y revient !
Certains couples ont bien compris le bénéfice qu'il peuvent en tirer et vont même chercher ces stimuli auprès d'autres couples. C'est l’échangisme, le mélangisme, le côte-à-côtisme etc... autant de pratiques qui permettent d'assouvir ses fantasmes de voyeurisme et d'exhibitionnisme.
Pour autant, nul besoin de devenir libertins pour laisser libre-cours à ces mêmes fantasmes, le couple peut très bien se suffire à lui seul ! Il suffit d'un peu d'imagination, d'un miroir, d'une caméra et de bouleverser quelques habitudes pour s'ouvrir de nouvelles perspectives !
Voir... être vu... tentez l’expérience !
Je ne connais personne qui reste de marbre au spectacle de son ou sa partenaire se donnant du plaisir ! C'est un scenario facile à mettre en œuvre. Tu te caresses, je te regarde... ou l'inverse. Vous pouvez aussi pimenter la chose : la personne qui se livre au regard et aux caresses est nue, sur le lit. Celle qui assiste au spectacle reste habillée, en retrait sur un fauteuil. Vous allez voir, ça change tout, l'impact n'est pas du tout le même !
Autre petit scenario possible pour assouvir sans conséquences ses penchants exhibitionnistes : vous faite l'amour et vous imaginez (à haute voix) qu'une ou des personnes vous regardent. Excitation garantie !
Si ça n'est pas déjà expérimenté, faire l'amour dans la nature, sur la plage ou de nuit dans la cage d'escalier (!) peut aussi procurer quelques frissons. Même si vous êtes seuls, la simple perspective de pouvoir être surpris peut vous faire connaître des sensations nouvelles !
Pour conclure en trois phrases
On pourrait refouler ces penchants naturels au nom de la morale, de la bienséance...
On pourrait aussi se demander si du coup, on ne manque pas quelque chose ?
À vous de voir !
Commentaires
Enregistrer un commentaire